Histoire de la Ville

Par Jean-Pierre PENISSON

Géologie

Le territoire de la commune de Bogny-sur-Meuse est situé à la limite du Cambrien et du Dévonien. La ligne de partage orientée nord-ouest-sud-est passe par l’Ermitage, les carrières des Pleines Roches au-dessus du château Marcadet, le ruisseau de la Retorse à Tournavaux et le Corpia.

Au nord de cette limite, c’est le Cambrien représenté par les étages du Devillien supérieur et du Revinien inférieur (entre 540 et 500 millions d’années).

Les roches qui composent ces étages sont des quartzites clairs, parfois blanc, des schistes verts et des phyllades ou schistes gris et verts.

Au sud, le Dévonien est représenté par des schistes, phyllades et quartzites gris. Les schistes ou phyllades de Levrézy sont souvent calcareux.

La limite est constitué par le poudingue : conglomérat de galets plus ou moins roulés qui ont été entraînés par des coulées boueuses dans la mer dévonienne. Cette formation dite de Fépin correspond à la transgression marine du Dévonien inférieur (Siluro-Dévonien). Elle est âgée d’environ 435 millions d’années.

Toutes ces roches ont été transformées par métamorphisme et plissées au cours de deux orogenèses (calédonienne, puis hercynienne).

Au Quartenaire, le cours de la Meuse s’est imposé dans le relief. Des terrasses alluviales aux Grands Ducs, aux Perrières, sur le plateau des Janves ou aux Beaux Sarts témoignent de la présence du fleuve au Mindel, il y a plus de 600 000 ans.

Depuis les hauteurs des Quatre Fils Aymon nous pouvons admirer un beau méandre abandonné dessiné par les ruisseaux des Eparus et de la Soque avec entre eux la Cense de Roma et au centre le sommet des Beaux Sarts.

Préhistoire

Les terrasses du Mindel pourraient receler des vestiges du Paléolithique inférieur.
Un seul artefact attribué à cette période a été sorti des alluvions de la Meuse en 1876.
C’est un petit biface acheuléen (104mm), très émoussé, en silex gris bleuté à patine jaunâtre.
Il semble avoir beaucoup voyagé dans les alluvions du fleuve.

Deux sites, datés du Mésolithique ancien-moyen (8 500 à 8 000 avant notre ère), l’un aux Beaux Sarts, l’autre à Malgache représentés par de petits artefacts dont des microlithes témoignent du passage des chasseurs à l’arc.

Le néolithique est présent :

  • par une lame cassée en silex gris de Spiennes (Belgique) ramassée dans les bois au-dessus de la maison forestière du Pierroy,
  • par un grattoir en silex gris bleuté mis au jour dans un jardin au lieudit La Grosse Roye à Levrézy,
  • par une hache herminette découverte sur le plateau des Janves,
  • par un éclat de silex gris ramassé sur le sentier des Grands Ducs (cet éclat pourrait aussi être attribuable au Mésolithique
  • par une hachette en roche verte de très petite dimension (38 mm) qui appartient au Néolithique final.

Quatre lames et un nucleus appelé livre de beurre en silex blond du Grand-Pressigny découverts aussi en 1876 dans les alluvions de la Meuse auraient pu être ajoutés à l’ensemble cité ci-dessus. Leur présence groupée et leur état de fraîcheur surprenant ne peuvent confirmer une position archéologique certaine.

En conclusion de ce survol de la Préhistoire, citons encore dans la littérature, «une grande pierre carrée que l’on regarde comme un monument druidique et qu’on appelle Table de Maugis». Cette pierre faisait partie des multiples blocs provenant du démantèlement des quartzites des Quatre Fils Aymon. Aucune preuve archéologique ne permet de la considérer comme un dolmen.

Toutes ces découvertes témoignent de la présence de l’homme préhistorique sur le territoire de Bogny-sur-Meuse à partir du Mésolithique et de son installation dès le Néolithique.

Histoire

La Ville de Bogny-sur-Meuse est née de la fusion (le 1 janvier 1967) des trois communes de Braux, Château-Regnault et Levrézy. Chaque commune à son histoire qui de près ou de loin suit le même chemin que l’histoire du département.

Braux

Braux dont l’origine remonterait au VIIè siècle lorsque les prêtres ermites portant le nom de Calabrais s’installèrent pour évangéliser ce fond de vallée d’Ardenne. Autour de cet oratoire quelques maisons s’implantèrent et en 837, l’église collégiale est construite. L’archevêque EBBON y fait transférer les restes de Saint Vivent. La Collégiale devient Prévôté de 845 à 882 sous l’autorité de Hincmar, archevêque de Reims, avec 28 villages sous son autorité.

En 960, pour échapper à ses ennemis, le Chapitre de Braux se met sous la protection des comtes de Rethel qui soumettront peu à peu tout le pays pour former la Châtellenie de Château-Regnault.

À partir de 1290, l’histoire du Chapitre de Braux se confond avec celle de Château-Regnault.

Le village fut détruit à cinq reprises : en 1528 par les Impériaux et les Huguenots, en 1537 par les Hérétiques de Sedan, la même année, Jean de Louvain seigneur du château de Linchamps à la tête des brigands et avec la complicité des Espagnols de Charles Quint pille, brûle Château-Regnault, Braux, Nouzon et Monthermé et passe par les armes tous ceux qui résistent. Pour la quatrième fois Braux est victime en 1554 des mêmes ennemis.

En 1560, l’église de Braux est fortifiée par Catherine de Clèves qui épouse en 1572 Henri de Guise.

En 1587 Braux est une fois encore détruite par les Huguenots de Sedan. En 1629, la ville passe à la couronne de France et dès lors sa destiné suivra celle des autres communes.

Pendant la guerre 1914-1918, Braux, Château-Regnault et Levrézy subissent l’occupation ennemie.

En mai 1940, les rues Camille Desmoulins et Jean-Baptiste Clément sont bombardées et détruites par une attaque allemande.


Château-Regnault

Château-Regnault dont l’origine remonterait entre le Xè et le XIIè siècle avec la construction d’un château primitif sur l’éperon enserré dans une boucle de la Meuse. Peu de temps après il est détruit.

En 1227, Hugues IV, comte de Rethel, reconstruit le château et s’empare des terres du Chapitre de Braux.

En 1320, la châtellenie passe à la maison de Flandre. Le village de Mouzon est réuni au domaine de Château-Regnault qui devient seigneurie en 1305 (sur un domaine de 43 villages).

En 1400, Château-Regnault passe à la maison de Bourgogne et devient indépendante en 1545 sous François de Clèves.

Ruiné en 1554 par Jean de Louvain et les Impériaux, le Château est reconstruit l’année suivante par François de Clèves.

En 1560, Catherine de Clèves devient Princesse souveraine de Château-Regnault. Elle épouse en seconde noce Henri de Guise en 1568 qui devient prince de Château-Regnault et s’arroge le droit de battre monnaie.

Il est assassiné en 1588. La principauté passe successivement à François de Bourbon, prince de Conty, puis dans les maisons de Flandre, de Bourgogne, d’Albert de Clèves, puis de Lorraine.

Le 10 mars 1629, un contrat d’échange est signé avec le roi, mettant fin à la principauté tout en conservant sa prévôté, son tribunal de haute et basse justice, sa maîtrise des Eaux et Forêts.

Château-Regnault devient française en 1630 sous Louis XIII.

En 1635, des invasions espagnoles et autrichiennes ravagent le pays. En 1643, la résistance de la garnison de Château-Regnault empêche la venue des renforts venus du Luxembourg d’arriver à Rocroi. Ce qui permet la victoire française. En 1653, le village est incendié par les mêmes ennemis.

En 1667, les Espagnols et les Brandebourgeois pillent la région.

Entre 1687 et 1689, Louis XIV fait démolir la forteresse.

Lors de la Guerre de succession d’Espagne, en 1701, les troupes des Pays-Bas ruinent le pays.

En 1790, Château-Regnault perd tous ses privilèges et devient une commune rattachée au canton de Thilay.

En 1815, le village très affaibli subit l’occupation russe. C’est un pays très pauvre, ravagé par les nombreux conflits frontaliers.

Quelques petites clouteries à la main subsistent difficilement.


Levrezy

Levrézy appartenait au Chapitre de Braux grâce à son moulin. Le village est certainement contemporain de Braux. Son implantation dans une zone de confluence étendue au pied des Euvies en fait un site remarquable.

En 937, il apparaît dans le domaine de la Collégiale de Braux.

En 1227, Levrézy devient propriété du Seigneur de Château-Regnault, Hugues de Rethel.

Quelques arpents de terre et le moulin restent dans les biens de la Collégiale.

À partir de cette date, Levrézy subira les mêmes calamités que les deux autres communes.

En 1637, des religieux, les Hyéronimytes, frères ermites de l’ordre de Saint Jérôme, s’installèrent à proximité du moulin. L’autorisation fut accordée par Louis XIII pour permettre aux paroissiens pendant l’hiver, faute de pont, (crues et glaces sur la Meuse) de pouvoir fréquenter l’église.

En conflit avec les chanoines de Braux, et suite à l’assassinat du père supérieur en 1644, ils quittèrent sans laisser de traces leur installation récente.

L’essor industriel est comparable à celui des autres communes.

Lors de la libération, les Allemands fusillèrent par représailles Jean Brasseur et brûlèrent trois maisons.

En savoir plus > Lire la fusion des communes

Lieux d’intérêt

Évènements

Le Aymon Folk Festival fête sa quinzième édition en 2012. C’est un festival de musique folk se déroulant sur le site de la platelle des 4 Fils Aymon. Avec une programmation centrée au début sur la mouvance celtique des débuts, qui s’est depuis ouverte à d’autres musiques du monde.

Personnalités liées à la commune

  • Jean Rogissart (1894-1961), écrivain né à Braux.
  • Maurice Blin (1922-2016), ancien sénateur de la Ve République, né à Levrézy.
  • Eric Sleziak, sculpteur de Woinic établi à Bogny 36.
  • Annie Fortems, pionnière du football féminin, née à Chateau-Regnault en 1955.
  • Jean-Baptiste Migeon (1768-1845), né à Braux, député de 1827 à 1830 (opposition), maire de Mézières.
  • Angelo Pavone, résistant, mort en action le 2 septembre 1944 à Château-Regnault.
  • Maurice Louis (1895-1943), ouvrier de la métallurgie puis de l’alimentation, maire de Château-Regnault (1938-1940), mort en déportation à Oranienburg.

Héraldique

Les armes de la Ville

D’azur à trois fleurs de Lys d’or au bâton péri de gueule en bande, au chef de gueules chargé de trois vires entrelacées d’argent.

Louise Marguerite de Lorraine, veuve de François de BOURBON CONTI céda la principauté de Château-Regnault à Louis XIII en 1629.

Références : Armoirie de Bourbon-Conti. 


Bibliographie

  • BAUDOIN Gérard, Au pays des Quatre Fils Aymon ; Ville de Bogny-sur-Meuse, mars 1988
  • BESTEL Ferdinand, Compte-rendu de l’Assemblée Générale du 6 mars 1938 ; Bulletin de la Société d’Histoire Naturelle des Ardennes, tome 33, p.6 ; 1938
  • HUBERT Jeab-Baptiste, Géographie historique du département des Ardennes, 357 pages; 1838
  • HUGUEVILLE-DISEUR Marcelle, Bogny-sur-Meuse – Historique ; l’Ardennais, 27 décembre 1966
  • PECHENARD Abbé, Château-Regnault-Bogny ; 1897
  • PENISSON Jean-Pierre, Un burin en silex découvert à Monthermé » (Ardennes), quartier de Laval-Dieu ; Préhistoire et Protohistoire en Champagne-Ardenne, n°7, p. 23-24, 4 figures ; 1983
  • PENISSON Jean-Pierre, Deux haches polies provenant de Monthermé (Ardennes) et appartenant au Musée de Charleville; Préhistoire et Protohistoire en Champagne-Ardenne, n°11, p. 61-64, 2 figures ; 1987.
  • PENISSON Jean-Pierre, En marge de la légende des Quatre Fils Aymon; Terres Ardennaises n°49, p. 1-4, 5 figures ; 1994.
  • PENISSON Jean-Pierre, Un moulin à Levrézy ou quand l’histoire corrobore des évènements récents; Terres Ardennaises spécial inondations n°50, p. 60-67; 1995.
  • PENISSON Jean-Pierre, Sentier Nature et Patrimoine 08120 Bogny-sur-Meuse; Publication de l’Office de Tourisme ; 24 pages ; 1998.
  • PENISSON Jean-Pierre, Une découverte préhistorique à Bogny-sur-Meuse (Ardennes). Hache polie ou herminette; Préhistoire et Protohistoire en Champagne-Ardenne, n°24, p. 103-106, 4 figures ; 2000.
  • PENISSON Jean-Pierre, Bogny-sur-Meuse à l’époque préhistorique ; Inventaire ; Terres Ardennaises n°73 ; p. 23-31 ; 9 figures ; 2000.
  • PENISSON Jean-Pierre et ROZOY Jean-Georges, Le Canton de Monthermé à l’époque préhistorique. Suite de l’Inventaire; Terres Ardennaises n°75 ; p. 1-8 ; 7 figures ; 2001.
  • RIGAUX Marcel, Les Quatre Fils Aymon et le Roc la Tour, Bulletin de la Société d’Histoire Naturelle des Ardennes du 8 mai 1938.
    RIGAUX Marcel, Sur l’ancien château féodal de Château-Regnault ; Le Petit Ardennais, janvier 1938.